Par : Fleury LJ
Publié : 17 décembre 2012

Les lieudits

Les yûedits, décembre 2009

Jean-Marie Moine

Paru dans Arc Hebdo, décembre 2009

Les yûedits

Tot c’ment moi, vôs èz chur’ment yé dains lai feuye, dains l’ Q. J. di vinte de nôvembre, qu’ des jurassiennes tçheûmeunes v’lïnt faire ïn nové caidaichtre, po qu’ è feuche seingne-émoinne-aivijè (informatisé). Ç’te poûere tçheûm’nâle graiy’nouse de Niungniez trove qu’ les djûenes dgeûrnâchions n’ compregnant pus l’ patois, qu’ les patois noms tchaindgeant aidé d’ daidroit-graiphe (orthographe), qu’ è y’ é des diff’reinnes aippeullâchions ch’lon qu’ an conchulte le fonchie Yivrat obïn les offichiâs valous. Sains comptaie qu’ tot piein d’ yûedits poétchant les meinmes noms. Enfïn, èlle veut tot ranchionnâyijaie. Ènne ïnmaîdge môtre ïn bôs qu’ an aipp’lait Lai Voivre è Niungniez. È bïn, note graiy’nouse veut qu’ an dieuche mit’naint La Voivre, nian pus Lai Voivre  ! I n’ coégnâs p’ ç’te graiy’nouse, i n’ sais p’ qué l’ aîdge èlle é, ch’ èlle ât encoé djûene obïn nian. Mains i crais qu’ tot c’ment ces des djûenes dgeûrnâchions qu’ èlle é djâsè, èlle ne comprend p’ bïn l’ patois. I n’ veus p’ yi dire ç’ que l’ patois mot Voivre veut dire en frainçais. I aî taint d’ piaîji d’ saivoi qu’ les Quoûes d’ aigné v’ lant â moins vadgeaie ci bé patois nom. Èlle n’ é ran qu’ d’ le d’maindaie en des véyes dgens d Niungniez qu’ daint chur’ment voûere de câre qu’ an mâmoinneuche dïnche yote paitrimoinne. Bïn chur qu’ i n’ seus p’ non pus d’ aiccoûe d’aivô ç’te faiçon d’ aidgi. Lai tçheûmene de Mont’gnez veut, lée âchi, seingne-émoinne-aivijaie son caidaichtre. Braivo en mes couboirdgeais qu’ aint déchidè d’ vadgeaie yôs patois yûedits. Tiaind qu’ i râdrés dains mon v’laidge, i veus aidé poéyait regu’naie en L’ Aignelat, És Pessattes obïn És Peurerats… I aî ènne ch’conde boinne novèlle è aippâre és Jurassiens pe és patoisaints  : l’ Çaçhe de raicodje di patois d’ lai Jurassienne Sochietè d’ l’ Émulâchion, l’ Voiyïn é eûffie graichiouj’ment le d’rie frainçais – patois glossére en totes les écôles di Cainton di Jura. I vôs l’ dis chi poch’que les feuyes di Jura n’ en aint piepe ïn poi djâsè. Les Voiy’nous r’mèchiant l’ Iconanmat di Cainton di Jura qu’ s’ ât tchairdgie d’ poétchaie ces glosséres dains les écôles. J-M. Moine

Les lieudits

Tout comme moi, vous avez certainement lu dans le journal, dans le Q. J. du vingt novembre, que des communes jurassiennes allaient faire un nouveau cadastre, pour qu’il soit informatisé. Cette pauvre secrétaire communale de Lugnez trouve que les jeunes générations ne comprennent plus le patois, que les noms patois changent toujours d’orthographe, qu’il y a des appellations différentes selon qu’on consulte le Registre foncier ou les valeurs officielles. Sans compter que plusieurs lieudits portent les mêmes noms. Bref, elle veut tout rationaliser. Une image montre une forêt qu’on appelait Lai Voivre à Lugnez. Eh bien, notre secrétaire veut qu’on dise maintenant La Voivre, non plus Lai Voivre  ! Je ne connais pas cette secrétaire, j’ignore quel âge elle a, si elle est encore jeune ou non. Mais je crois que comme toutes ces jeunes générations dont elle a parlé, elle ne comprend pas bien le patois. Je ne lui dirai pas ce que le mot Voivre signifie en français. J’ai tant de plaisir à savoir que les Queues d’agneau (les habitants de Lugnez) conserveront ce beau nom patois. Elle n’a qu’à le demander à des vieilles personnes de Lugnez qui doivent certainement voir d’un mauvais œil qu’on malmène ainsi leur patrimoine. Bien sûr, je ne suis pas non plus d’accord avec cette façon d’agir. La commune de Montignez va, elle aussi, informatiser son cadastre. Bravo à mes combourgeois qui ont décidé de conserver nos lieudits patois. Quand j’irai à nouveau dans mon village, je pourrai toujours me promener à L’ Aignelat, aux Pessates ou aux Peurerats… J’ai une deuxième bonne nouvelle à apprendre aux Jurassiens et aux patoisants  : le Cercle d’étude du patois de la Société Jurassienne d’Emulation, le Voiyïn (le Regain) a offert gracieusement le dernier dictionnaire français – patois à toutes les écoles du Canton du Jura. Je vous le signale car les journaux du Jura n’en ont pas du tout parlé. Les membres du Cercle d’étude du patois remercient l’Economat du Canton du Jura qui s’est chargé de distribuer ces dictionnaires dans les écoles.